Vive les Négociators, à bas les Matamores !
Allez, je prends les paris. En cette fin d'après midi le président de la Catalogne va marquer un recul sur ses ambitions (exigences ?) d'indépendance.
Il va demander l'ouverture de négociations et faire ce qu'il faut pour ne pas perdre la face.
C'est malin d'avoir fait tout ça pour ça.
Je trouve que la cause catalane, et celle du rôle des régions en Europe en général, vaut mieux que la dramaturgie à laquelle nous avons assisté (et continuerons ?).
C'est souvent la même histoire : en négociation, "les gens" (comme dirait l'autre) s'imaginent toujours que le plus Matamore est le plus malin. J'ai passé un moment hier après midi avec un prospect qui avait l'air d'avoir envie de faire de ses équipes des matamores en puissance. Je ne suis pas sûr d'avoir envie de lui répondre qu'en négociation, le matamore a tort !
Neil Rackham, un consultant britannique qui a publié de nombreux ouvrages et articles sur la négociation a résumé de son côté un certain nombre de préceptes qu'il est utile de se remémorer alors que Donaldor le Matamore répand sur la planète ses remugles belliqueux, en parfait écho au "Rocket Man" qu'il dénonce.
Voyons ce que nous dit Neil Rackham :
Les négociateurs efficaces évitent :
- les mots qui irritent : autant vous dire qu'au grand prix de la négo, notre JL Mélenchon national est très très mauvais. Les injures qu'il adresse à Manuel Valls (d'origine catalane, gare au gorille !) le disqualifient complètement. J'ai été d'autant plus choqué de l'affaire qu'il le fait sur le dos de la Nouvelle-Caéldonie et je ne vois pas très bien quel intérêt il y a à rallumer les énervements.
- les contre-propositions : c'est la porte ouverte aux batailles d'arguments, qui signent nos magnifiques guerres de position. En négociation sociale, très très fréquent !
- la dilution des arguments : la maladie qui complète le point précédent. Cela revient à assommer l'autre de kilos d'arguments. Personne n'écoute personne. Chacun en rajoute.
- la spirale émotionnelle : c'est compliqué. Nous sommes des bêtes à réaction.
- les débats sans issue : En d'autres termes, les négociateurs tournent en rond
Par contre, ils :
- expriment souvent leurs émotions : autant vous dire que Trumpor le matamore n'est pas très doué dans ce registre. Obama était bien meilleur. Macron n'est pas mauvais, dans le bordel ambiant.
- recherchent systématiquement l'information : ce qui revient à dire qu'ils posent des questions. Qu'ils demandent pourquoi, qu'ils demandent comment, qu'ils demandent "et si ... ?"
- testent souvent la compréhension de leur interlocuteur : cela facilite "l'écoute active". Ils sont vigilants et attentifs. Pour trouver des idées et savoir se mettre à la place de l'autre, cela aide.
- préparent minutieusement plusieurs options possibles : et j'ajouterai qu'ils n'en font pas un fromage si l'option n'est pas acceptée, car ils ont compris que l'option est, par définition, non imposable !
- caractérisent leur comportement : pas facile car cela veut dire que le négociateur a la capacité, le recul pour se voir agir.
- se fixent des objectifs : ils savent où aller et leurs objectifs sont "SMART" (grand classique des écoles de management, l'acronyme signifie, pour ceux de mes éventuels lecteurs qui l'ignoreraient : spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et défini dans le temps)
- restent souples dans le processus : ce que Carles Puigdemont va devoir montrer si il veut y arriver au lieu de se "Boris Johnsoniser" façon catalane.
Bon, il me reste 1/4 d'heure à vivre avant de voir si j'ai gagné mon pari.
Si je l'ai perdu, nous allons donc rester dans le bras de fer. La pression va continuer à monter. Pobre Europa.
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