La maladie du "off"




Avec la sortie de "Un Président ne devrait pas dire ça" de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, François Hollande vient de jouer avec le feu et il s'est gravement brûlé. En d'autres temps, d'autres socialistes jouaient (passez moi l'expression) avec les femmes de ménage et se cramaient complètement.

Il n'existe pas de hasards ni de coïncidences, nous avons eu un Président dit normal, élu par effraction, qui n'en revenait pas depuis 5 ans d'avoir le job qu'il avait et qui ne s'en croyait pas capable en même temps qu'il s'en rengorgeait. Pour faire un parallèle avec la réplique favorite de la marionnette d'un autre Corrézien d'adoption fameux, tous les matins en se rasant, notre Normal se disait : "Putain, t'as vu, chuis Président !"

Le mur du çon

François Hollande fréquente la presse depuis des années, il a l'habitude des satisfactions comme des galères que peuvent faire vivre les relations avec les médias, il connaît parfaitement bien les règles du jeu. J'ai acheté le bouquin tellement je n'en revenais pas. Ma première réaction a été de me dire, façon Canard Enchaîné, "le mur du çon a explosé". Alors faites comme moi, lisez le bouquin, je vous le conseille car je me dis qu'il restera dans les annales

En dehors du "buzz" infernal que ce bouquin inouï génère, je n'en ai encore lu que la préface et ceux qui n'ont pas encore eu à réfléchir à ce que signifie travailler ses relations avec les médias y puiseront plein d'excellentes leçons. La première rejoint la toute première phrase sarcastique du bouquin publié il y a une dizaine d'années par Franz-Olivier Giesbert sur Jacques Chirac : "on ne se méfie assez des journalistes".  Et cette leçon a à voir avec cette habitude des déclarations "off the record" que de très nombreux dirigeants, et pas seulement Hollande, prennent l'habitude de faire.

Le "off" est une maladie. Elle naît de deux besoins : chez les journalistes, celui de devoir donner des citations entre guillemets pour alimenter leurs articles et valider les faits rapportés, les analyses, les commentaires, etc... La citation "entre guillemets" est un matériau journalistique indispensable. Quand un journaliste n'en a pas, son récit est tout au plus une chronique, un jus de crâne. Ce n'est pas ou plus un journaliste, c'est un blogueur :-) Le "off" naît aussi du besoin de dirigeant de faire comprendre aux médias tel ou tel aspect d'une actualité ou de son action sans pouvoir s'afficher ouvertement. Sans oublier que, sans"off", pas de Watergate non plus par exemple. Il y a un lien entre le "off" et la protection des sources.

La vérité ?

Gérard Davet et Fabien Lhomme, dans le projet qu'ils ont conçu, jouent avec les lignes. Pour eux, un dirigeant politique qui pratique le "off" est un gars qui n'assume pas. C'est parfois le cas c'est vrai et certains dirigeants méritent des coups de pied aux fesses pour ça, mais bon, si la lâcheté est un vilain défaut, on ne va pas en faire un monde non plus dans ce domaine. Les auteurs sont persuadés qu'ils agissent, je cite, pour "la vérité". Je trouve cela très présomptueux. Je préfère les sarcasmes de FOG ; au moins n'est-il pas dupe du jeu qu'il joue.

Pinocchio

Doit-on pour autant considérer que Hollande est une victime ? Pas du tout ! C'est la fable du "tel est pris qui croyait prendre". A force de se rengorger tout seul du job qu'il a décroché au nez et à la barbe de tous ceux qui le traitaient de "Flanby" ou de "Fraise des Bois", notre Petit Chose Elyséen s'est cru tellement fort qu'il croyait tout maîtriser. Son ego le rattrape et se venge. Alors il s'est fait avoir par nos deux chasseurs de vérité. Dans leur préface, les deux lascars racontent très bien la séquence : le jour où ils annoncent que le livre va paraître, le Président leur dit benoîtement qu'il est donc temps de "relire les citations". Et là, que nenni. Hollande n'a pas insisté. "C'est tout à son honneur" osent nos auteurs. En fait, Hollande sait alors qu'il s'est mis dans de sales draps. Il est comme Pinocchio et les deux voleurs. Il est arrivé aux pays où les enfants deviennent des ânes.

Never off

Ce qu'il y a de bien dans cette histoire c'est que je vais pouvoir encore mieux recommander à mes clients de ne jamais céder à la tentation du "off" lors de leurs rencontres avec des médias. Pour paraphraser Jean Rochefort alias le colonel Toulouse dans "Le Grand Blond avec une Chaussure Noire" : "Le off, mon petit Perrache, c'est un piège à cons". Si vous avez quelque chose à dire à un journaliste, cela doit pouvoir se retrouver dans le journal (ou un livre, donc), demain, après demain et jusqu'à la fin des temps sans que vous ayez à rougir. Et si vous voulez relire vos "citations", alors mettez vous d'accord avec les journalistes en question. N'importe quel chargé de com' sait cela. Or il semble que de ce point de vue, nos deux lascars aient quand même annoncé la couleur.

Cette histoire en dit sûrement long sur François Hollande, son ego, sa relation avec les médias et sa perception du rôle d'un Président. Ce n'est pas grandiose (euphémisme). Elle en dit aussi long sur l'état de la presse, l'état du Monde, les connivences qui existent parfois, les risques que l'on prend quand on a le pouvoir et quand on le fréquente. Bref, au final, cela reste une histoire intéressante, je vais poursuivre ma lecture !

PS : même si ce bouquin est inouï, il l'est toujours moins que le torrent de saletés que l'on voit défiler aux Etats-Unis avec la candidature de l'abominable Donald. Son métier c'était a priori de construire des tours. En fait ce type s'est plu à nous planter son phallus aux quatre coins de la planète. Beurk. Par comparaison encore, j'ai bien aimé le premier débat de la "primaire de la droite et du centre". Personne n'a cédé à la tentation du "show" en dépit d'une mise en scène qui faisait penser à celle des jeux télévisés. Nos Augustes et nos Clowns Blancs ont bien joué leur partition. Un merci spécial à NKM, la seule à avoir parlé des "travailleurs indépendants" ; je suis content que la seule femme du lot ait pensé à moi :-))





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