Burn Out, Bore Out, présentéisme et salariat
L'hebdomadaire Le 1, dont je recommande la lecture à tous, vient de sortir son dernier numéro sur "la France des CDD". Je voudrais faire un lien entre ce sujet, la France des CDD, et un autre point qui a surgi aux infos ces derniers jours : le syndrome de "bore out"(épuisement professionnel par l'ennui), petit cousin du célèbre "burn-out"(syndrome d'épuisement professionnel en général). Je ferai aussi le lien avec le sujet du "présentéisme".
Motivation / démotivation : chacun ses ingrédients
En substance, le manque de sens donné à son travail génère ce que l'on a appelé le burn out.
La quantité (excessive ou insuffisante) de travail, les objectifs mal fixés, la réunionite, les process mal foutus, le principe de précaution, le politiquement correct, la pression du temps, les rivalités, etc... peuvent être facteurs de rupture du sens, mais leur impact sur chacun d'entre nous est très variable.
Tous ces facteurs de perte de sens dépendent tellement des individus qu'aucune généralisation ne peut se faire. Nos (dé)motivations sont toujours particulières.
Je cite toujours le cas de ce dirigeant parmi mes proches, en charge d'un nombre incalculable de marchés, qui, malgré cette charge, les déplacements incessants, la pression et les jeux de pouvoir qui existent dans la multinationale dont il est une des figures de proue, mène une vie équilibrée, s'amuse, s'occupe de sa femme et de ses filles, est présent pour ses amis et trouve encore le temps de bouquiner et de sortir. Professionnellement, il vit ce qu'il a envie de vivre. Et il semble avoir les moyens de se régénérer lorsqu'il est confronté à des situations qui lui déplaisent.
J'en croise d'autres qui en ont autant ou moins sur les épaules mais qui s'ennuient, s'agacent ou se désespèrent du lundi matin au vendredi soir, et souvent le week end aussi car ce mal-être contamine au delà du lieu de travail. Ils ne savent plus comment recharger leurs batteries, ils ne se régénèrent plus, ils s'usent.
Ce sont d'ailleurs aussi souvent ceux là qui font du "présentéisme". Ils ont souvent peur. Ils croient qu'ils ne pourraient pas vivre sans leur entreprise. Et pourtant...
Le piège du salariat
Le "bore out" me paraît comme un des symptômes de cette maladie du présentéisme.
Le salariat est l'organisation du travail née de l'ère industrielle. Jusqu'à la fin du 19ème siècle, elle est donc très minoritaire. Puis elle s'est imposée. Nous sommes en train d'aborder une nouvelle ère. Du coup, ça craque de partout. Au-delà des discours convenus, les entreprises sont d'une infidélité absolue. Cela se comprend, une entreprise n'est pas faite pour donner du travail, elle est faite pour faire gagner de l'argent à ceux qui l'ont créée ou qui l'ont acquise.
Bien sûr le salariat a apporté beaucoup de progrès, au-delà des critiques sur les patrons exploiteurs. Sauf que maintenant, de plus en plus de patrons vont avoir envie d'exploiter de moins en moins de monde, surtout au prix que ça coûte en France. Du coup, les hommes deviennent bien souvent de simples "ressources humaines" que l'on décortique comme n'importe quelle ressource, ou alors ils sont sans travail salarié.
Trouver son histoire
Des aventures collectives sont bien sûr encore possibles. Enfin, je me plais à l'espérer. Encore faut-il qu'il s'agisse d'une aventure, d'une histoire écrite à plusieurs. Un très grand nombre de nos entreprises ou de nos institutions ont perdu ce sens de leur histoire. Je viens de terminer le très bon bouquin d'un de mes amis, Abdu Gnaba, sur "L'Explorateur et le Stratège", consacré au récit d'entrepreneurs familiaux (faites le vous offrir, c'est introuvable). Quand l'aventure collective a un sens, comme c'est le cas dans les récits de ce livre, cela vaut le coup d'être salarié. Il y a des chances d'échapper au burn out, au bore out et au présentéisme.
Maintenant, si vous n'avez pas la chance de travailler auprès de dirigeants que vous considérez comme des explorateurs et / ou des stratèges dont cela vaut le coup d'être salarié, soyez sans pitié pour ces employeurs qui vous ennuient et qui vous cassent les pieds. Fuyez les mauvais managers et les toxiques. Vous n'êtes pas responsables de leur inculture, de leurs obsessions ou de leurs complexes. Soyez libres. Vous valez plus, il y a mieux à faire, vous trouverez. Prenez le temps de chercher.
Au bout du compte, CDI ou CDD, fichez vous en complètement. Prenez ce qui vous nourrit, ce qui vous plaît, ce qui vous motive. Un CDD, cela peut être une bonne affaire. Un CDI, cela peut être la plaie. Pourquoi prendre pension complète quand on peut dîner à la carte ? C'est très ennuyeux les pensions de famille, il y a des dizaines de films qui montrent combien on s'y ennuie et combien on s'y engueule. Alors, si votre boîte a une tronche de pension de famille, quittez l'auberge, laissez tomber les Thénardier, cherchez votre histoire et racontez la. Le story telling n'est pas qu'une mode de la communication corporate. La performance est dans votre histoire. C'est cela qui vous rendra riche, même si ça n'est pas toujours très sonnant ni trébuchant... mais mieux vaut partir à la recherche de la pépite qui est en soi que d'attendre que les Thénardier deviennent généreux !
"Globalia" en bas de chez nous
C'est dire si je trouve décalé ce qui se dit dans le débat CDD / CDI. Le législateur construit des forteresses qui contribuent à entretenir l'ignorance de ceux qui y habitent et s'y calfeutrent et font passer ceux qui sont au dehors pour des paumés de la terre. Dire qu'on ose parler de "dialogue social"...
Il y a quelques années, Jean-Christophe Rufin avait publié un très bon bouquin d'anticipation intitulé "Globalia", vision de cauchemar d'un monde sous cloche. Et quand je lis ou regarde Hunger Games ou d'autres films d'anticipation pour ados du même tonneau, je retrouve la même idée.
Mais, en fait les enfants, le futur est en bas de chez nous. Et si certaines de nos entreprises et de nos institutions (comme le Ministère de l'Education Nationale par exemple) étaient déjà devenues des "Globalia" ?
C'est bientôt le printemps. Profitez en pour ne plus hiberner !
Motivation / démotivation : chacun ses ingrédients
En substance, le manque de sens donné à son travail génère ce que l'on a appelé le burn out.
La quantité (excessive ou insuffisante) de travail, les objectifs mal fixés, la réunionite, les process mal foutus, le principe de précaution, le politiquement correct, la pression du temps, les rivalités, etc... peuvent être facteurs de rupture du sens, mais leur impact sur chacun d'entre nous est très variable.
Tous ces facteurs de perte de sens dépendent tellement des individus qu'aucune généralisation ne peut se faire. Nos (dé)motivations sont toujours particulières.
Je cite toujours le cas de ce dirigeant parmi mes proches, en charge d'un nombre incalculable de marchés, qui, malgré cette charge, les déplacements incessants, la pression et les jeux de pouvoir qui existent dans la multinationale dont il est une des figures de proue, mène une vie équilibrée, s'amuse, s'occupe de sa femme et de ses filles, est présent pour ses amis et trouve encore le temps de bouquiner et de sortir. Professionnellement, il vit ce qu'il a envie de vivre. Et il semble avoir les moyens de se régénérer lorsqu'il est confronté à des situations qui lui déplaisent.
J'en croise d'autres qui en ont autant ou moins sur les épaules mais qui s'ennuient, s'agacent ou se désespèrent du lundi matin au vendredi soir, et souvent le week end aussi car ce mal-être contamine au delà du lieu de travail. Ils ne savent plus comment recharger leurs batteries, ils ne se régénèrent plus, ils s'usent.
Ce sont d'ailleurs aussi souvent ceux là qui font du "présentéisme". Ils ont souvent peur. Ils croient qu'ils ne pourraient pas vivre sans leur entreprise. Et pourtant...
Le piège du salariat
Le "bore out" me paraît comme un des symptômes de cette maladie du présentéisme.
Le salariat est l'organisation du travail née de l'ère industrielle. Jusqu'à la fin du 19ème siècle, elle est donc très minoritaire. Puis elle s'est imposée. Nous sommes en train d'aborder une nouvelle ère. Du coup, ça craque de partout. Au-delà des discours convenus, les entreprises sont d'une infidélité absolue. Cela se comprend, une entreprise n'est pas faite pour donner du travail, elle est faite pour faire gagner de l'argent à ceux qui l'ont créée ou qui l'ont acquise.
Bien sûr le salariat a apporté beaucoup de progrès, au-delà des critiques sur les patrons exploiteurs. Sauf que maintenant, de plus en plus de patrons vont avoir envie d'exploiter de moins en moins de monde, surtout au prix que ça coûte en France. Du coup, les hommes deviennent bien souvent de simples "ressources humaines" que l'on décortique comme n'importe quelle ressource, ou alors ils sont sans travail salarié.
Trouver son histoire
Des aventures collectives sont bien sûr encore possibles. Enfin, je me plais à l'espérer. Encore faut-il qu'il s'agisse d'une aventure, d'une histoire écrite à plusieurs. Un très grand nombre de nos entreprises ou de nos institutions ont perdu ce sens de leur histoire. Je viens de terminer le très bon bouquin d'un de mes amis, Abdu Gnaba, sur "L'Explorateur et le Stratège", consacré au récit d'entrepreneurs familiaux (faites le vous offrir, c'est introuvable). Quand l'aventure collective a un sens, comme c'est le cas dans les récits de ce livre, cela vaut le coup d'être salarié. Il y a des chances d'échapper au burn out, au bore out et au présentéisme.
Maintenant, si vous n'avez pas la chance de travailler auprès de dirigeants que vous considérez comme des explorateurs et / ou des stratèges dont cela vaut le coup d'être salarié, soyez sans pitié pour ces employeurs qui vous ennuient et qui vous cassent les pieds. Fuyez les mauvais managers et les toxiques. Vous n'êtes pas responsables de leur inculture, de leurs obsessions ou de leurs complexes. Soyez libres. Vous valez plus, il y a mieux à faire, vous trouverez. Prenez le temps de chercher.
Au bout du compte, CDI ou CDD, fichez vous en complètement. Prenez ce qui vous nourrit, ce qui vous plaît, ce qui vous motive. Un CDD, cela peut être une bonne affaire. Un CDI, cela peut être la plaie. Pourquoi prendre pension complète quand on peut dîner à la carte ? C'est très ennuyeux les pensions de famille, il y a des dizaines de films qui montrent combien on s'y ennuie et combien on s'y engueule. Alors, si votre boîte a une tronche de pension de famille, quittez l'auberge, laissez tomber les Thénardier, cherchez votre histoire et racontez la. Le story telling n'est pas qu'une mode de la communication corporate. La performance est dans votre histoire. C'est cela qui vous rendra riche, même si ça n'est pas toujours très sonnant ni trébuchant... mais mieux vaut partir à la recherche de la pépite qui est en soi que d'attendre que les Thénardier deviennent généreux !
"Globalia" en bas de chez nous
C'est dire si je trouve décalé ce qui se dit dans le débat CDD / CDI. Le législateur construit des forteresses qui contribuent à entretenir l'ignorance de ceux qui y habitent et s'y calfeutrent et font passer ceux qui sont au dehors pour des paumés de la terre. Dire qu'on ose parler de "dialogue social"...
Il y a quelques années, Jean-Christophe Rufin avait publié un très bon bouquin d'anticipation intitulé "Globalia", vision de cauchemar d'un monde sous cloche. Et quand je lis ou regarde Hunger Games ou d'autres films d'anticipation pour ados du même tonneau, je retrouve la même idée.
Mais, en fait les enfants, le futur est en bas de chez nous. Et si certaines de nos entreprises et de nos institutions (comme le Ministère de l'Education Nationale par exemple) étaient déjà devenues des "Globalia" ?
C'est bientôt le printemps. Profitez en pour ne plus hiberner !
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