De profundis : Notre-Dame-des-Landes et Net Neutrality



Le potage du bocage

Notre-Dame-des-Landes est un extraordinaire cas pratique de nos très fâcheuses façons d'envisager la négociation et la gestion de projet en général.
Nous sommes pourtant avertis depuis un siècle que les guerres de tranchées ne mènent nulle part, si ce n'est à d'autres violences.
Notre Jupiter national va donc prendre une décision dans les semaines qui viennent.
Je ne pense pas faire preuve d'une immense clairvoyance si j'écris qu'il va sonner la fin de la récré pour tous les protagonistes.
Aux acharnés en faveur de l'aéroport il est en effet temps de mettre un terme à ce bras de fer juridique sans aucun sens et travailler à d'autres options pour traiter le problème à résoudre. Quand j'entends Bruno Retailleau protester à l'avance contre la "négation de l'état de droit", je me dis que je l'entendais moins sourcilleux quand il défendait bec et ongles son candidat mis en examen.
J'aimerai aussi que les zadistes soient pris au mot et que nous leur demandions de travailler sur un projet écologique pour la "zone à défendre"... je ne doute pas qu'une grande partie du fretin qui s'agite dans ce bocage n'aille immédiatement se faire pendre ailleurs, sans qu'il soit véritablement besoin de montrer le moindre casque de CRS. Les zadistes cherchent la castagne. Avec ce genre de personnages, suivons le précepte : soyons chamallows. Le dur se noie dans le mou, si vous voyez ce que je veux dire.
Donc, vivement le de profundis Notre-Dame-des-Landes, passons à autre chose par pitié.

Au passage, le sujet est tellement encalminé qu'il permet même aux médias de réaliser ce que sont les ingrédients clefs d'une négociation raisonnée :

- le travail sur les intérêts des parties prenantes. Si notre Macron national n'a aucun intérêt à jouer aux cow-boys, il me semble aussi que les élus locaux, Retailleau excepté peut être et encore, n'ont plus grand intérêt à jouer le bras de fer. Quant aux zadistes, il fait froid, c'est l'hiver, il est temps de rentrer à la maison plutôt que de continuer à jouer aux scouts d'occasion les pieds dans la gadoue.
- éviter de confondre les personnes et le problème à résoudre. C'est bien parce que celui-ci répond à des paramètres très différents de ceux qui avaient été envisagés dans les années 60 que plaider "l'état de droit" n'a aucun sens. Nous ne construirions plus de Concorde aujourd'hui. Notre-Dame-des-Landes a un petit air de "Concorde des aéroports". Dire que les élus sont nuls et les zadistes des crapules, cela soulage sûrement, mais bon, so what... Même Libé et Le Figaro ont envie de changer de sujet.
- s'appuyer sur des "critères objectifs" pour que les parties prenantes ne se disent pas qu'ils sont en train de subir la volonté de l'autre. Il me semble que le dernier rapport produit sur le sujet apporte pas mal d'éléments dans ce domaine.
- rester créatifs et proposer des options à l'autre pour résoudre le problème que les uns et les autres ont en commun.
- réfléchir à ses plans B. Si les élus locaux avaient eu vraiment un besoin urgent d'accueillir un excès de trafic sur l'aéroport de Nantes, je les trouve pour le moins mous du genou et pas pressés. En 40 ans, pas la queue d'un plan B ? Auraient-ils fait preuve de davantage d'incurie que de pragmatisme ? Quant aux zadistes, ils ont sûrement d'autres foutoirs à mettre ailleurs pour continuer à faire valoir leur cause et exister médiatiquement. Les meilleurs feuilletons ont une fin.

Dans la série des "de profundis de la semaine" : la Neutralité du Net ou la victoire des rentiers sur les disrupteurs

Perso, voir le lobbying des opérateurs télécoms couronné de succès après dix laborieuses années d'efforts (minimum, car je me souviens de débats sur le sujet dès le début des années 2000), je trouve cela un peu triste. Honnêtement je ne suis pas sûr que cela soit une excellente nouvelle. Que mes diverses amitiés dans le secteur n'en prennent pas trop ombrage, mais je vois dans cette décision une victoire des rentiers sur les disrupteurs. Dommage.
Enfin, je veux quand même bien convenir que l'accès aux réseaux pour les multiples objets connectés et usages nouveaux et à venir nécessite un modèle économique différent. Il y a effectivement un problème à résoudre.
Peut être est-ce moi qui pleurniche sur la fin du coup de boutoir que le numérique a donné à toute une série de vieilleries. J'aimais bien ça.


Allez, rendez-vous en 2018, y'a du boulot sur le reste !



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