Ce que la série "Borgen" peut nous apprendre

 


Je viens d'achever les saisons 2 et 3 de la série danoise "Borgen" et vient d'entamer la saison 4.

 J'ai dix ans de retard avec les premières et suis à peu près dans les temps avec la dernière. Mieux vaut tard que jamais de toutes façons.

Je dois reconnaître que la saison 1 visionnée il y a quelques années m'avait bien plu mais sans plus. 

En ces temps de parlementarisme revivifié, plonger à nouveau dans les arcanes de la politique danoise m'a fait le plus grand bien. En fait je voyais à l'écran une première ministre et ses opposants travailler (et se chicaner aussi) comme j'aimerai que cela se passe dans notre cher, vieux, beau et doux pays.

Après tout, la vox populi entonnait l'hymne à la proportionnelle sur l'air des lampions et là, bing manque de bol, notre merveilleux scrutin majoritaire nous a accouché d'une assemblée toute proportionnée comme aucun proportionnaliste ne l'avait rêvé. Donc, chers amis de tous bords, proportionnons !

C'est le changement qui est radical

Changement culturel radical. La graine de godillot qui sommeille en tout homme politique français ne peut pas germer et ça les embête bien. Car, que le LFIste moyen me pardonne, mais les disciplines de vote façon petit caporal, on aime bien ça dans la gauche pas radicale dans ce changement-là !!

Dans Borgen, la première ministre minoritaire et centriste (truisme ?) passe son temps à monter des accords tantôt avec la droite, voire la droite de la droite dirigée par un vieux grigou qui fait penser à une sorte de Jean-Marie Le Pen qui aurait des pépins de dentition là où l'original a un souci avec son oeil, sans parler des écolos ou d'un équivalent PS. Tous ces braves gens se croisent sans trop d'animosité dans les studios d'une sorte de LCI danois et parfois un opposant à vélo peut même interpeller la première ministre au feu rouge pour lui poser une question ou lui lancer un ultimatum tellement "soft" qu'il ferait bien rigoler Mathilde Panot. 

Borgen dit le contraire de Shakespeare : il n'y a pas "quelque chose de pourri au royaume du Danemark". C'est plutôt nous qui ne sentons pas très bon !

Cela dit nos camarades de fiction sont encore plus emberlificotés que nous dans le politiquement correct. Le réac' de base que je suis soupire et se fait une raison car entre la tolérance maxi qui m'agace et leurs capacités de négociation, il y a bien un lien que je me dois de reconnaître, tout renvoyé à mes propres contradictions que je suis.

Mon brevet d'honnêteté intellectuelle étant ainsi rudement gagné, j'en profite pour remettre en lumière quelques préceptes forts utiles à nos parlementaires sous Prozac ou amphétamines, c'est selon :

- Vouloir convaincre ne sert à rien. En négociation, ce qui compte c'est de chercher à comprendre les autres. C'est parce que vous les comprendrez que vous arriverez à un bon résultat, pour eux comme pour vous.

- le compromis dont les médias qui bavassent nous rebattent les oreilles est une quête de loser. La négociation "gagnant-gagnant" n'est pas organisée autour d'une quête éperdue et un peu bébête d'un juste milieu qui n'existe pas.

- le bon négociateur est un individu créatif. Il travaille ses options, ses "variants" comme me le disait assez drôlement un dirigeant rencontré ces derniers temps. C'est un joli mot, "variant", car comme nous le savons les virus sont créatifs et c'est pour cela qu'ils durent !

- le bon négociateur pose davantage de questions qu'il ne fourbit ses arguments. C'est utile les arguments mais cela ne pèse que pour 25% dans la réussite d'une négociation. Tous ceux qui veulent comprendre d'où je sors cette statistique ont le droit de m'appeler.

- qui veut négocier travaille sa relation avec ceux dont il a besoin. S'insulter, c'est mignon mais pas hyper-productif. 

- les négociateurs ont des stratégies de communication. Ils ont réfléchi à leurs messages, à leur timing, aux porte-parole, aux canaux de communication qu'ils vont employer. Je ne suis pas certain que je favoriserai Twitter contrairement à ce que font les uns et les autres. 

Dans Borgen, comme c'est une fiction, la première ministre a des conseillers en com' super bons. Mais, chère Elisabeth Borne, prenez exemple sur le personnage de Birgitt Nyborg, elle est d'une efficacité admirable. Ne craignez pas les conseillers en com', n'écoutez pas les journalistes. Ils ne disent que des bêtises sur ce point et en plus ils mentent car ils rêvent tous (ou presque) de pouvoir faire ce métier !

Au dirigeant vu récemment et qui partait en vacances, j'ai proposé un petit programme cinématographique pour revenir, à la rentrée, en ayant médité sur la négociation sans que cela ne soit trop prise de tête et en ayant engrangé plein de bonnes idées pour être en forme et poursuivre le long cycle de négociations dans lequel il s'est embarqué.

Alors, en plus de Borgen, je partage ces recommandations avec mes millions de lecteurs / followers 😜

- Douze hommes en colère, de Sidney Lumet avec Henry Fonda. Ou comment observer le pouvoir du questionnement !

- Diplomatie, de Volker Schlöndorff. La preuve que comprendre l'autre est la meilleure (la seule ?) voie à emprunter pour réussir une négociation

- Adults in the Room, de Costa Gavras, pour comprendre, entre autres choses, que faire des "coups" ou créer des effets de surprise ne sert à rien dans une négociation, sinon à envenimer la situation.

Allez hop, bon été à tous !

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