Haro sur la langue de coton et vive Modiano

Hier soir, sur la scène du théâtre du Rond Point où l'équipe du journal "Le 1" mettait en scène son comité de rédaction à l'occasion de la sortie de son numéro consacré à la langue française, un complice du journal est venu vilipender le mal que cause à la langue française la langue des politiques, des entreprises et des publicitaires... J'ai trouvé cette envolée lyrique un peu trop convenue mais j'y ai bien aimé quand même l'apostrophe : "qui écrira un jour le poème du management et de la mort ?"
L'alliance des 2 termes se trouve magnifiquement, si j'ose dire, illustrée ce matin par l'annonce du renvoi du DG de Sanofi, Chris Viehbacher. En 30 minutes, précisent les journaux... Voilà qui n'est pas ordinaire. En voilà un, le président du Conseil d'Administration, qui vient de solder sa "collection de timbres" comme on dit en analyse transactionnelle. Les communiqués élaborés pour annoncer la nouvelle ne peuvent complètement dissimuler le choc qui s'est produit. Alors, oui, la langue du management a bien cet air de "langue de bois ou cette langue de coton", ce sabir de convenances que l'on emploie lorsqu'on doit raconter quelque chose de dur à expliquer. Sur la scène du 1 hier soir, Eric Fottorino faisait d'ailleurs remarquer qu'en France on dit "c'est coton" pour dire "c'est compliqué" alors qu'au Bénin on dit "c'est caillou"... un terme plus juste pour désigner ce qui est dur à dire !
C'est pourquoi j'ai envie de défendre Fleur Pellerin. Elle a benoîtement avoué qu'elle n'avait pas lu de livres de Patrick Modiano, notre nouveau Prix Nobel. Bon, c'est très mal. Mais je préfère cette spontanéité (faisons lui crédit de la spontanéité) à la réponse, jadis, d'un secrétaire d'Etat au Commerce qui avait avoué que son livre de chevet était "Zadig et Voltaire"... Une bien grosse ânerie sous stress de derrière les fagots pour laquelle j'ai envie d'être indulgent aussi d'ailleurs car finalement, de la part d'un secrétaire au Commerce, sortir le nom d'un réseau de boutiques à la place d'un ouvrage du 18ème siècle, cela montrait tout juste à quel point il était envahi par son job :-)
Fleur Pellerin a aussi avoué qu'elle n'avait plus le temps de lire autre chose que des notes de ministère ou des rapports administratifs. Je la plains bien. Je remarque aussi, au passage, que le Ministère de la Culture qui lui a été attribué était apparu comme une promotion. Fleur Pellerin vient donc d'atteindre son niveau d'incompétence. Le principe de Peter est toujours actif ! Bon, enfin, je ne l'ai pas hyper-défendue, là.

En tout cas il est temps de redécouvrir Patrick Modiano. Je suis content de le voir revenir à la "une" car j'aimais faire référence à lui lorsque, dans certains entretiens ou séminaires, je dois présenter ce type de personnalité imaginatif, réfléchi et calme et dont les pensées ont besoin d'être canalisées pour que la personne passe à l'action. Un type de personnalité que de nombreux managers perçoivent négativement (c'est un mou, il rêvasse, il est transparent... et autres amabilités) alors que, ça y est, les gars, ce type de personnalité décroche le Prix Nobel ! Souvent ma référence tombait à l'eau car la plupart des participants de moins de 40 ans ignorait qui il était ou n'avait rien lu de lui. Fleur Pellerin n'est pas seule ! Maintenant, je vais rencontrer plus de monde au fait de l'existence de Patrick Modiano. Vive le Nobel.
En plus je pense qu'il serait un excellent écrivain capable de pondre ce "poème du management et de la mort" !

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