Amélie ou comment s'en débarrasser



Pour ceux qui ont quelques lettres, le titre finaud de cette chronique fait allusion à cette pièce d'Eugène Ionesco, "Amédée ou comment s'en débarrasser" dans laquelle un personnage, un cadavre, allégorie d'un secret caché dans une pièce de l'appartement qu'occupe un couple, est affecté d'une étrange maladie, celle de la "progression géométrique", ce qui lui fait envahir progressivement tout l'appartement et dont il est nécessaire d'arriver à se débarrasser, ce qui n'est pas simple.

Je ne me souviens plus des multiples péripéties de cette pièce, mais j'avoue que ce qui arrive à Amélie Oudéa-Castéra, m'y fait irrésistiblement penser.

A l'heure où j'écris, AOC, comme les médias la surnomment, occupe encore son fauteuil de ministre mais j'avoue que je ne la crédite pas d'un grand avenir. Comme l'a dit un petit plaisantin de la radio, Alexis Vizorek, "chez Médiapart, ils l'appellent "la muse""... Vous avez le droit de rire !

AOC a confondu le terrain de tennis et la communication en territoire hostile. Confrontée à une question pourrie lancée par un journaliste qui s'y connaît, elle a réagi au lob désagréable par un smash radical. Le problème, c'est que le smash n'a pas conclu le point mais le retour a été un foudroyant passing-shot avec balles à fragmentation en plus.

Dans sa gaullienne conférence de presse, le Président a reconnu qu'elle avait eu un propos maladroit et considéré que, comme elle s'était excusée, l'affaire pouvait en rester là.

C'était bien essayé mais on est en campagne électorale et les pit-bulls de sortie n'allaient pas s'arrêter en si bon chemin. L'odeur du sang est la plus forte. Alors, tout est bon dans le cochon, les attaquants ne font pas dans le détail. Comme en plus cela permet de jouer aux fléchettes sur le lycée Stanislas voire l'école privée toute entière, sans parler du tennis, sport élitiste par excellence, et qu'il y a un peu de petit bois pour alimenter le feu, ça continue de crépiter. Peut-être la râlerie paysanne va-t-elle modifier le fond de l'air, j'attends en tout cas l'événement qui va faire changer de disque. Ce serait sa seule bouée.

J'aimerai faire passer à AOC son Diagnostic Personnel de Résistance aux Jeux Psychologiques. Elle a eu une grosse faiblesse. J'aurais pourtant pensé qu'une ancienne joueuse de tennis de bon niveau, ex-n°18 française, ex-championne du monde des moins de 14 ans, avait davantage de sagacité.

Elle s'est excusée, elle a eu raison contrairement à l'opinion exprimée l'autre jour sur un plateau par ce grand benêt péroreur de Luc Ferry, mais cela ne va pas suffire. C'est suffisant pour l'enseignante de maternelle mise en cause, mais ça ne le sera jamais pour des syndicats enseignants dont la posture victimaire est un fond de commerce bien alimenté, avec de bonnes raisons mais évidemment une dramatisation qui nuit au dialogue ! Ce sera encore moins suffisant pour Mediapart !

Bref il y a crise de la communication, une expression que je préfère à celle de "communication de crise" et, tant pis si je rabâche, j'en rappelle les caractéristiques et les recommandations pour y faire face : 

- la seule stratégie qui vaille est celle de la reconnaissance et, de fait, les excuses "pour avoir blessé" ne suffisent pas. C'est l'erreur qu'il convient de reconnaître : l'erreur de se prendre le chou sur une sombre histoire de maternelle (sauf à faire partie de ces parents tarés qui pensent que l'avenir de leur progéniture est bouclé dès la moyenne section), l'erreur d'avoir accepté une rémunération qui ne peut que froisser et qui témoigne clairement de l'abus de fric dans le sport en général et le tennis en particulier, etc...

Or AOC utilise deux autres stratégies face à la crise qui sont toutes perdantes : 

- elle latéralise : elle dit que d'autres font comme elle. C'est vrai pour l'école privée, c'est moins vrai si on se concentre sur le lycée Stanislas, c'est ingérable sur la question de la rémunération. Cette stratégie peut marcher si le dossier est solide, or il ne l'est pas, quelles que soient ses composantes.

- elle refuse / nie le problème : elle accuse des parlementaires "militants". Jadis Fillon accusait "le cabinet noir", avec le succès que l'on sait. Il y a des parlementaires Renaissance dans le groupe de parlementaires auteurs du rapport lié à la FFT, donc ça ne marche pas non plus pour Amélie.

Bref, elle est carbonisée. Dans l'Education Nationale évidemment et même sur le versant Jeunesse & Sports et JO de son portefeuille. Aucun intérêt de la garder à bord. Chaque fois qu'elle ouvrira le bec, elle se fera crucifier. D'autant plus qu'elle n'a aucune assise politique ou électorale. Elle n'incarne rien, en fait.

Bref son discours est creux, son dossier en défense est vide : elle ne présente plus aucun intérêt.

Tchao Amélie.

PS : les seuls personnages capables de résister à ce genre de pression sont les grands gangsters, comme Donald Trump. Parce qu'ils ont réussi à cristalliser une armée de suppôts. Cela dit, nul n'est invincible et j'espère bien à propos de Donald, que Nikki Haley continuera à l'enquiquiner jusqu'au trognon, c'est à dire jusqu'à la convention. Elle sous-entend qu'il est gâteux, j'adore. Les insultes qu'il lui envoie en retour le détruiront, lui. Si, si, faut y croire ! Allez je m'accroche.


Commentaires

  1. Je ferais de AOC un cas d’école : elle n’a pas préparé la seule et unique question qu’elle était certaine d’avoir en tant que ministre de l’EN : où ses enfants sont-ils scolarisés ? Elle répond, Un peu bravache en mode « même pas mal », spontanément et sans réfléchir puis elle se justifie avec un argument qui méprise les professionnels de l’école qu’elle aura tous les jours devant elle et au final s’avère un mensonge immédiatement démenti par les témoins de l’époque. Bref n’en jetez plus ! Et il va la garder ! J’en prends le pari. Il attend que cela passe. Mais tous les jours le feuilleton continue car il est trop beau ! Il y’a tellement de lièvres à lever que l’opportunité est trop belle. Iza

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne prendrai pas les paris face à toi ! C'est difficile de se déjuger lorsqu'on est un dirigeant et qu'une erreur de casting nous saute au nez... Et pourtant, le bon conseil, en management, c'est de savoir être "cruel à temps"...

      Supprimer
  2. Finalement elle sort du Ministère de l'Education Nationale et garde la Jeunesse & Sports et les JO, le secteur lui ayant apporté son soutien. Une sortie par le haut, en fait.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

La Fièvre : pour, de bonnes ficelles ; contre, mon mauvais esprit

L'expérience ? Un peigne pour les chauves

C'est parfois fatigant de lire le journal

Les clowns blancs, les Augustes, les élections et nous

L'Amiral Larima

Films de profs

Fantômette et le trésor des coachs

Boris Macron et Emmanuel Vian

Roger Hodgson, Supertramp et la négociation

Frankenstein 3.0 est une femme !